Serveur ou barman ne peuvent pas être des métiers choisis par défaut. L’Umih Côte-d’Or (Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie) en fait une profession de foi. Et fait appel au cluster Créativ’ pour mettre la 3D et le théâtre dans la boucle de la formation. Numérique, générationnel, révolutionnaire…

Par Dominique Bruillot – Photos : Jean-Luc Petit

Sonia Michel (Umih Formation) et Fabrice Rey (Créativ’) accompagnent Marion Rodet, jeune sommelière de La Closerie (Maison Philippe le Bon), dans l’expérimentation des nouvelles technologies. L’équipement de réalité virtuelle a été aimablement prêté par Yann Turc-Arnoux, de la société Gaïa Le Complexe à Chenôve.

Sonia Michel (Umih Formation) et Fabrice Rey (Créativ’) accompagnent Marion Rodet, jeune sommelière de La Closerie (Maison Philippe le Bon), dans l’expérimentation des nouvelles technologies. L’équipement de réalité virtuelle a été aimablement prêté par Yann Turc-Arnoux, de la société Gaïa Le Complexe à Chenôve.

Dijon Métropole a gagné ses galons de Cité de la Gastronomie et largement contribué à la reconnaissance des Climats de Bourgogne. Puis s’est offert un classement en ZTI, Zone de Tourisme International. De quoi placer haut la barre de l’accueil en ces terres dédiées aux plaisirs de la bouche.

Sauf que, dans la réalité des choses, en prévision d’une montée en puissance de la fréquentation, le service n’est pas toujours au niveau. En cause, un désamour conjoncturel pour certains métiers de la restauration et de l’hôtellerie. Cuisiner, ça va, faire le sommelier aussi. Mais poser des plats sur la table ou remplir des verres est trop souvent (et à tort) considéré comme un acte sans qualification, réservé à une population qui ne sait (ou ne veut) rien faire d’autre. Grossière erreur dans laquelle les patrons d’établissement s’engouffrent parfois eux-mêmes, en étant peu regardants ou exigeants sur le recrutement.

Dès le premier regard

Isabelle Grandin, secrétaire générale de l’Umih Côte-d’Or, n’élude pas la question : «  Les jeunes ne viennent pas forcément par conviction ou envie, c’est dommage, car nous sommes dans un secteur où l’ascenseur social existe vraiment. » Un point de vue à élargir à l’ensemble du commerce.

Ce sujet, Fabrice Rey le connaît bien. Le directeur de Créativ’, un cluster (1) présidé par la conseillère régionale Océane Charret-Godard, sorte de laboratoire de « politiques publiques renouvelées en matière d’appui aux entreprises et d’emploi », travaille déjà sur ce terrain. En rencontrant Patrick Jacquier, président de l’Umih, l’idée d’une collaboration étroite et commune sur ce dossier a donc semblé naturelle. « Dès le premier regard, dès la première rencontre avec le client, le professionnel doit est en mode promotion et commercialisation de ses produits et du territoire, rappelle simplement Fabrice Rey. L’enjeu est donc de développer les compétences de la relation client, et de créer les conditions d’apprentissage pour le faire dans la mesure où il s’agit d’un impensé pédagogique à ce jour. »

Isabelle Grandin, la secrétaire générale de l’Umih Côte-d’Or, voit dans la réalité virtuelle un moyen de réinventer les procédés de formation et booster l’intérêt des jeunes dans un secteur où, en réalité, « l’ascenseur social existe vraiment ».

Isabelle Grandin, la secrétaire générale de l’Umih Côte-d’Or, voit dans la réalité virtuelle un moyen de réinventer les procédés de formation et booster l’intérêt des jeunes dans un secteur où, en réalité, « l’ascenseur social existe vraiment ».

Quête de sens

En 2018, il sera déjà question d’organiser un grand événement pour la promotion des métiers des CHR (Cafés, Hôtels, Restaurants) et du commerce dans le contexte d’une ZTI. Créativ’ s’inspire pour cela de la Vallée de l’Arve, entre Mont-Blanc et Genève, qui a su rendre « glamour » l’ingrat décolletage (procédé d’usinage par enlèvement de matière) industriel. Soit une belle marge de manœuvre pour nos serveurs. Mais attention ! Il ne s’agit pas de refaire un énième salon ennuyeux. « Les générations actuelles, j’en fais partie, sont en quête de sens, assure le jeune directeur de Créativ’. Il faut leur dire qu’elles font un boulot d’excellence ! » Ce qui commence par un éclairage sur les ambitions du métier et une sensibilisation à la dimension culturelle et historique du patrimoine immatériel qu’est par exemple le repas des Français. Puis l’intégration d’outils adaptés à l’époque, les serious games (2) a minima, voire l’immersion pédagogique dans la technologie 3D avec la réalité virtuelle.

Un rôle pour chacun

Sonia Michel, responsable de l’Umih Formation à Dijon, est associée à la réflexion sur le projet. « Nous nous positionnons sur des modules de formations courtes avec des moyens technologiques nouvelle génération, et l’événement sera un élément déclencheur pour que tout soit prêt avec l’arrivée de la Cité de la Gastronomie », s’enthousiasme cette dernière. Un rapprochement avec des start-up parisienne et lyonnaise, qui regroupent gamers, experts, scénaristes et professionnels de la pédagogie, porte ses premiers fruits. À terme, on pourra « recréer des situations dans les restaurants et travailler sur le langage du corps, très important dans la relation client. »

Sur ce dernier point, en complément des lunettes 3D qui devraient sérieusement rajeunir l’image des méthodes de recrutement ou de formation, Fabrice Rey fait appel à des professionnels de l’improvisation. L’idée est originale et tellement évidente quand on y réfléchit. Elle donne à ses bénéficiaires le juste sentiment que la vie professionnelle est un espace où chacun tient son rôle, avec le talent et la conscience qui sont les siens, serveur ou pas serveur.
Sous nos applaudissements.

(1) Les clusters sont des réseaux d’entreprises constitués majoritairement de PME et de TPE, fortement ancrés localement, souvent sur un même créneau de production et souvent à une même filière.

(2) Un serious game est une application informatique qui combine une intention sérieuse (à visée pédagogique, informative, marketing…) avec des ressorts ludiques issus du jeu vidéo ou de la simulation informatique.

UMIH Côte-d’Or. 11 rue Louis de Broglie à Dijon, immeuble le Millénium Bâtiment B. 03.80.65.81.81 – [email protected]


L’Umih en quelques mots

Premier syndicat patronal du secteur CHRD (cafés, hôtels, restaurants, discothèques), l’Umih est présente dans tous les départements français à travers plus de 2 000 élus et 300 collaborateurs. En 2002, elle a fondé son pendant pédagogique (Umih Formation) devenu, cinq ans plus tard, centre de formation professionnelle à part entière avec 180 formateurs pour plus de 25 000 chefs d’entreprises et salariés formés en 2015. Particulièrement active, l’antenne côte-d’orienne de l’Umih est présidée par Patrick Jacquier et vice-présidée par Lionnel Petitcolas.