Il préside la Splaad avec une vision politique de sa mission d’aménagement de l’agglomération dijonnaise 100% au service des collectivités territoriales. Déterminé, l’universitaire est aussi porté par l’idée qu’il faut créer des « espaces apaisés ». Il n’y a donc rien de froid dans un immeuble ou un parking à construire.
Par Dominique Bruillot
Photo : Christophe Remondière
D’abord, Il y eut la Semaad, Société d’économie mixte d’aménagement de l’agglomération dijonnaise, créée le 30 mai 1961 par le chanoine Kir (donc la ville de Dijon), pour aménager le lac qui portera le nom du maire et encourager des réalisations immobilières autour (Belvédère, la Fontaine-d’Ouche et La Cras). Cette société de droit privé, majoritairement détenue par des collectivités territoriales et quelques privés, principalement des banques, expérimente actuellement sa privatisation sous l’impulsion de la Caisse d’épargne. A elle, désormais, de se consacrer à d’autres prises de risques « incompatibles avec la gestion publique », dixit François Rebsamen. De beaux chantiers (la Chocolaterie, le quartier Heudelet, Crossject, la DRASS…) l’attendent déjà. Pour une autre histoire…
Depuis 2009, il y a la Splaad, Société publique d’aménagement de l’agglomération dijonnaise qui, finalement, fait le même métier. Sauf que détenue exclusivement par des collectivités territoriales (Grand Dijon, Dijon, villes périphériques et Conseil régional) elle est de la même façon exclusivement destinée à des aménagements au profit de ses actionnaires publics. « Notre mission, résume son président Pierre Pribetich, un proche du maire de Dijon, c’est de créer des écoquartiers, construire des parkings et réhabiliter des lycées depuis que nous avons fait entrer la Région dans notre capital. »
Actions sous contrôle
Voilà pour le décor et une meilleure compréhension de ce qui distingue la Splaad de la Semaad. Enfin, on l’espère. Pour le reste, la philosophie de cette mission s’est elle-même éclaircie. « Il faut avoir l’assurance du contrôle des actions par l’ensemble des actionnaires » pose au préalable Pierre Pribetich. Son statut public donne en effet à la Splaad une pleine maîtrise des projets qui ont à la base un caractère politique. Le quartier de l’Arsenal (1 500 logements), l’Ecocité du Jardin des maraîchers (1 500 logements), le parking Monge, la Zac des fontaines à Senneceyles- Dijon, quelques « opérations structurantes comme à Saint- Exupéry sur le territoire de Chenôve », sont des grands chantiers décidés en assemblée. Il appartient donc de veiller à ce que ladite assemblée en connaisse les tenants et les aboutissants.
Pierre Pribetich n’a rien, à la base, d’un baron de l’immobilier. Homme de conviction, ce prof de l’Université, se dit « curieux de nature » et s’est engagé au PS « dans le souci de favoriser égalité ». Sa vision de l’urbanisme, qu’il partage bien évidemment avec François Rebsamen, est donc politique, même si l’excitation du défi à mener lui fait dire que « le plus beau projet sera toujours le prochain ! »
Espaces apaisés
Cette vision pour Dijon est celle « d’une vraie capitale proposant un parcours résidentiel qui va du loyer modéré à la propriété ». Avec un tir encore à rectifier au plan démographique puisque « nous sommes dans une croissance positive en ville bien que 300 à 400 personnes quittent chaque année l’agglomération en raison d’une absence de solutions concernant l’accession à la propriété, abordable sur le plan financier ».
Le programme intensif de construction des logements conduit depuis 15 ans (10 000 logements, voir aussi notre portrait interview de François Rebsamen en page 18), répond à des attentes précises en matière d’habitat. « Nous consacrons 10 millions d’euros chaque année au soutien à la réalisation d’opérations essentiellement de type HLM » rappelle Pierre Pribetich, « pour autant, on a cartographié ces implantations, et dans les communes en déficit de logement social (ndlr : en référence à la loi SRU), là on intensifie l’effort ».
La mise en avant de la mixité provoque parfois des éternuements. En 2010 par exemple, l’implantation de 11 logements à loyer modéré dans une villa historique et bourgeoise au numéro 65 de la tranquille avenue Victor-Hugo a déclenché les émois. Peu importe, l’opération est jugée par son promoteur comme un succès. « On nous avait aussi prédit qu’il serait impossible de faire tomber la barre Billardon, renchérit le président de la Splaad, or, aujourd’hui, quand on va aux Grésilles, comment pourrait-on regretter de l’avoir fait ! »
Tout cela rejoint un voeu porté par l’aménageur public : créer des « espaces apaisés », quitte à bousculer quelques lignes que l’on croyait pourtant solidement ancrées dans les esprits. Il n’y a donc rien de froid dans un immeuble ou un parking à construire.