Préservation de la ressource, potabilisation, distribution, gestion des pluies : le sujet de l’eau est désormais central dans les villes. Via son agence Odivea, Dijon Métropole fait figure d’excellent élève. Explications avec Antoine Hoar…eau.
Rue Monge et place Bossuet, les travaux battent leur plein. La municipalité transforme cet axe pénétrant pour le végétaliser et l’embellir. Mais avant toute chose, pour améliorer la gestion des eaux de pluie. « Nous utilisons l’eau de pluie comme une ressource et ne la considérons plus comme un déchet », résume Antoine Hoareau, vice-président de la métropole, en charge notamment de cet important dossier eau. L’élu préside aussi Odivea, l’agence de l’eau de la métropole créée en 2021.
Auparavant, l’eau de pluie était collectée par le réseau d’évacuation, unitaire quand il est confondu avec les égouts, comme au centre de Dijon, ou séparatif. L’eau de pluie du centre-ville arrive ensuite à la station d’épuration, où elle doit être stockée. Un gigantesque bassin de collecte a été construit à cet effet au niveau de la station Eau Vitale à Longvic, incroyable cathédrale enterrée. Mais avec la multiplication des orages, capables de saturer ce réseau en quelques minutes, même une telle structure ne s’avèrera pas toujours suffisante pour empêcher les rejets d’eau de pluie mêlée à des eaux usées vers les rivières. Il importait d’inventer une nouvelle façon de faire. Place Bossuet, les travaux ont commencé par la définition des points d’implantation d’arbres, des fosses profondes, associées à des réservoirs d’eau. L’eau de pluie traverse le sol de la place – les pavés sont jointés au sable à cet effet – pour rejoindre ces réservoirs, le surplus s’infiltrant pour rejoindre la nappe phréatique.
Se désimperméabiliser
La ville cherche aussi à se désimperméabiliser. Son maire François Rebsamen a pris la mesure des problématiques de réchauffement et de l’importance de la végétation, même dans le centre historique que l’on dit si minéral. Pour y parvenir, elle doit aussi convaincre les propriétaires de réaliser des aménagements. « 70 % du territoire est privé, 30 % est public », note Antoine Hoareau. L’enjeu est que, quand c’est possible, les eaux de pluies ne soient pas envoyées dans le réseau de collecte, mais infiltrées dans le sol, à l’aide de puits perdus. « Nous conduisons une vaste étude sur cette question, en nous intéressant à une cinquantaine de parcelles test où nous irons voir les propriétaires pour discuter avec eux des potentiels aménagements à réaliser », détaille l’homme de l’art.
L’ambition est de conduire ce chantier sur les quinze prochaines années là où, sur la base d’un taux de renouvellement du territoire urbain de 1 % par an, cela aurait pris 100 ans sans démarche active.
Agir à la source
La métropole agit également en amont, au niveau de la gestion de la ressource. Longtemps, Dijon a été considérée comme une ville avec une eau de médiocre qualité. Les travaux de l’ingénieur Darcy, en 1840, feront d’elle la première ville de France dotée d’un réseau d’abduction d’eau potable. Aujourd’hui, les 46 000 m3 consommés quotidiennement par la métropole et les 40 communes associées desservies proviennent de 12 points de captation, dont 4 d’importance stratégique. Deux d’entre-eux, le Rozoir et Morcueil, sont des sources karstiques, où l’on puise dans une nappe phréatique alimentée par les pluies. Pour pallier les épisodes de sécheresse, la métropole pompe de l’eau dans la Saône, au niveau de Poncey-les-Athée, qu’elle traite avec une unité de potabilisation fonctionnant avec des filtres au charbon actif.
Un travail de suivi constant est également opéré sur le réseau de distribution. Pour identifier les fuites, les opérateurs mettent en place des systèmes de télérelevés de consommation, qui permettent de définir, individuellement, mais aussi à l’échelle de quartiers, où se situent les fuites. Une équipe d’Odivea s’occupe exclusivement de cette problématique.
« Nous sommes capables de trouver même des fuites minimes, de type fuite de chasse d’eau, en observant les micro-consommations pendant la nuit », détaille enfin Antoine Hoareau, qui ne laisse définitivement rien passer sur ce dossier.
Optim’Eau, la douche écolo
Lancée en juin 2024, l’opération Optim’Eau a connu un grand succès. En quelques semaines, 32 000 kits gratuits, composés d’un pommeau de douche économe et de deux mousseurs pour robinet, ont été distribués aux habitants, en lien avec les délégataires de l’eau et de l’assainissement Odivea, Sogedo et SUEZ. « Ces kits permettent de diviser par presque deux la consommation d’eau lors d’une douche, ou au robinet », explique Antoine Hoareau. Pour que ces kits ne terminent pas au fond d’un tiroir, la métropole a choisi de ne pas distribuer à tout le monde, mais uniquement aux personnes en faisant la demande. Lors de cette première distribution, près d’un tiers des foyers dijonnais ont été équipés. Une nouvelle opération sera lancée à la rentrée. C’est grâce à des initiatives de ce type que la métropole parvient à maîtriser et même à réduire sa consommation d’eau. « En 15 ans, alors que nous avons gagné 30 000 habitants, nous avons fait baisser nos prélèvements annuels, qui étaient de 25 millions de m3 par an, à 19,5 millions de m3 », se félicite l’élu. L’enjeu est aussi financier : l’eau, ressource gratuite, est facturée autour de 4 euros le m3 dans la métropole. Chaque goutte compte. « Vous payez le service de distribution de l’eau, confirme Antoine Hoareau. À titre de comparaison, l’équivalent en eau de source se chiffre à 150 euros. Pour l’eau minérale, 400 euros. » L’eau, ça fait aussi réfléchir !