James Bond avait son Permis de tuer, L’Umih a son Permis de Bourgogne. L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie, qui représente 20 000 acteurs en Bourgogne dont le tiers en Côte-d’Or, saisit le virage des Climats de Bourgogne pour créer de nouveaux codes de conduite chez nos super VRP de la Bourgogne. Patrick Jacquier et Lionnel Petitcolas, les hommes forts du syndicat départemental, en parlent avec assurance la main bien sur le volant.
Propos recueillis par Claude Laroche
Photo : Christophe Remondière
Ce que dit l’un est assumé par l’autre et vice-versa. Patrick Jacquier et Lionnel Petitcolas, respectivement président de l’Umih et vice-président en charge de l’hôtellerie, parlent d’une seule voix, au nom du secteur qu’ils représentent, soit 650 adhérents sur le seul département de la Côte-d’Or. Accueillir, loger, restaurer, guider, séduire et vendre le territoire est le lot quotidien d’une population qui, sur les ChampsElysées de la Bourgogne, vit une profonde mutation alors que l’inscription des Climats de Bourgogne au patrimoine mondial propulse nos terroirs sur une nouvelle planète.
L’inscription induite du secteur sauvegardé à ce même patrimoine mondial, les cités promises de Beaune (vins de Bourgogne) et Dijon (Gastronomie et vins), préparent les esprits de l’hôtellerie et de la restauration régionale à une spectaculaire mutation. Les deux hommes forts de l’Umih n’ont pas attendu que tout cela sorte de terre pour anticiper cette évolution, ils répondent en chœur à nos louables questions.
L’Umih c’est quand même un peu plus qu’un syndicat ?
Notre rôle est d’accompagner les nouveautés, nous devons innover, trouver de nouvelles façons de vendre la Bourgogne, travailler sur l’aspect touristique. L’aide à la formation et la promotion de nos métiers en est un fer de lance.
D’accord, mais en sortant des sentiers battus et rebattus si possible…
Oui, il faut réfléchir avec des gens créatifs (sourire). Le Permis de Bourgogne est là pour ça, il va contribuer, de manière ludique tout en étant fondamentalement sérieux, à former nos acteurs au minimum de connaissances dont nous avons besoin pour parler des bourgognes et les mettre en avant.
Patrick Jacquier (à droite) et Lionnel Petitcolas, président et vice-président de l’Umih 21, confiants en l’avenir des secteurs de l’hôtellerie et de la restauration, ont anticipé les défis lancés par les Climats de Bourgogne et la Cité de la gastronomie et des vins.
Le permis de Bourgogne ?
C’est une formule assez révolutionnaire de formation sur une journée, qui rassemble les bases de la connaissance des vins de bourgogne, sur un ton et un questionnement « grand public ». L’originalité de cette formule repose d’ailleurs sur le mode de validation, un quiz en 100 questions assorti de la remise d’un « Code du Permis de Bourgogne » qui détaille chacune des réponses à ces questions, et sera accessible en dehors de l’Umih.
La profession n’est donc pas à la hauteur du défi des Climats de Bourgogne…
Les restaurateurs ont souvent la tête dans le guidon, à nous de leur donner une vision de l’avenir et chez nous, l’avenir, c’est le bourgogne. On est, sur ce sujet, plus ou moins associés à la Cité de la gastronomie et des vins.
Plus ou moins ?
Nous avons écrit à François Rebsamen pour lui rappeler que nos adhérents sont dans l’attente d’un partenariat qui enrichirait l’offre de la Bourgogne. Connaître les rudiments, le b.a.ba de la vente et la base d’un vin est déjà une façon de progresser, le Permis de Bourgogne aura ce pouvoir, il est en phase avec l’exception bourguignonne.
C’est donc un marketing d’un genre nouveau.
On va vous faire rire, mais dans le domaine du marketing, on prend souvent exemple sur Mac Do et son sens aigu de la formation. Avec notre « permis », la technique est la même, on fera en sorte que chaque employé, voire chaque acteur de notre filière puisse connaître les rudiments du produit qu’il est censé représenter, donc vendre, dans les meilleures conditions possibles.
Et pour le reste, comment ça se passe par chez nous ?
Aujourd’hui, l’économie collaborative a fait son entrée dans nos métiers. Ce qui nous différencie d’elle, pourtant, c’est l’hospitalité et le service. Chez nous, les gens sont formés au vin, à l’accueil, au service, à la conciergerie, notre prestation s’assure d’être passée par un circuit de formation. On a affaire à une « ubérisation » du système.
D’autant que nous allons évoluer vers de nouvelles clientèles…
L’afflux créé par de nouveaux équipements comme la future Cité de la gastronomie et des vins va effectivement renforcer l’arrivée de nouvelles populations touristiques. Pour faire face à la montée actuelle, nous mettons en place deux formations sur l’accueil et les habitudes des Chinois, même si, en ce moment, ces derniers sont un peu freinés par les attentats.
Ce climat d’insécurité joue beaucoup sur la fréquentation ?
Les attentats ont transformé le contexte, si la vision du tourisme est de +5 % à l’échelle mondiale elle est plutôt de +2 % en ce qui concerne l’Europe. Cela dit, on avance quand même. A Paris, par exemple, on commence à ouvrir des hôtels « gros porteurs » un peu comme on le fait avec les avions.
Et Dijon, avec toutes ces ouvertures d’hôtels, n’est-elle pas à saturation ?
L’augmentation des chambres est de 37 % en deux ans dans les 4 étoiles, ce qui traduit en même temps un repositionnement vers le haut de l’hôtellerie locale, qui en avait besoin. L’Umih salue le développement de la ville, mais le syndicat doit être partie prenante, c’est le message que nous faisons passer.
D’autant que vous représentez tout le monde.
On est capables effectivement de représenter un hôtel de 10 chambres comme un gros porteur de 150 chambres (ndlr : le plus gros sur Dijon, l’Holiday Inn Toison d’Or, en a 141), mais Dijon a une place à part sur ce terrain, son parc a été fortement rénové, 91 % de nos chambres sont en phase avec les nouvelles normes. Nos 3 étoiles ont souvent un potentiel de 4 étoiles.
Un permis pourquoi, pour qui ?
Le Permis de Bourgogne est né d’une collaboration étroite entre l’Umih formation et la revue Bourgogne Magazine, son éditeur Dominique Bruillot et son spécialiste des vins de Bourgogne, Jacky Rigaux. Le concept se résume à une journée de formation « pédagoludique » en dix temps, qui débouche, en fin de journée par un test de 100 questions basiques sur les vins de Bourgogne, dont il suffit de cocher les réponses, comme pour le code de la route finalement. Les stagiaires reçoivent ensuite leur « Permis de Bourgogne » et un « Code du Permis de Bourgogne », édité à part (200 pages, sortie septembre 2016), qui sera diffusé par ailleurs pour les candidats libres et celles et ceux qui voudront se frotter au quiz. Ouvert aux professionnels dans un premier temps, dans le cadre d’actions en formation, il sera ensuite proposé, sous une variante, aux autres, les touristes et amateurs de vin en herbe par exemple.
