Ou comment le vigneron Philippe Charlopin a décidé de faire appel au maçon Martial Ducherpozat pour réinventer une cuverie aux référence cisterciennes.
Par Dominique Bruillot
Photos : Christophe Remondière
Philippe Charlopin, figure emblématique du vignoble de GevreyChambertin, a fait le choix, comme beaucoup d’autres, de créer une cuverie adaptée aux exigences de notre époque. Donc de construire un bâtiment de type industriel, de plain-pied, dont un mur est mutualisé avec celui de son ami Bernard Bouvier. Fonctionnel, théoriquement conçu pour optimiser la gestion des stocks et des flux. A l’usage, un espace naturellement dédié à la conservation des vins, sans artifice climatique, s’est avéré nécessaire.
Alors, retour aux sources, Philippe Charlopin fait appel à son neveu Martial Ducherpozat, maçon du patrimoine de la quatorzième génération (la quinzième est en route), champion toutes catégories de la verticale familiale artisanale, inscrit au Guinness book pour cette performance. Et lui lance un défi qui n’est pas fait pour déplaire au spécialiste: réaliser une construction complète en pierre, annexée au bâtiment existant, mais dans une certaine inspiration cistercienne
Cistercienne, au XXIème siècle ? « Corniches, œil de bœuf, peinture à l’ocre naturelle des boiseries extérieures, etc… Nous avons fait dans les règles de l’art de l’esprit monastère et dans la pure tradition bourguignonne, tuiles plates en terre cuite en provenance d’Alsace comprises ».
Ce chantier est perçu par l’entrepreneur de Fixin comme « une belle aventure architecturale et humaine, digne de la sensibilisation que suscite le long de la route des grands crus, l’inscription des Climats de Bourgogne au patrimoine mondial ». Ce qui n’a rien d’un luxe. L’entrée de Gevrey-Chambertin gagnera beaucoup de l’émergence de ce type de bâtiments.
Le retour aux sources de la spiritualité est un point sensible aujourd’hui. Il passe par un retour aux traditions et à des matériaux nobles, « une vague de fond » durable dans l’esprit et dans le temps. Ces démarches esthétiques et historiques ont aussi des vertus économiques et écologiques. Sous la tôle, la « clim » tourne en permanence pour maintenir à bonne température les grands vins. Avec un lieu pensé pour ça, authentiquement bourguignon, Philippe et son fils Yann remettent certaines pendules à l’heure. Le plus beau des patrimoines est parfois celui qui reste à construire.
En passant par Doras
Le nom de Doras (800 collaborateurs sur le grand est) n’est pas naturellement associé dans les esprits au patrimoine. Pourtant, dans son champ d’intervention, ce groupe spécialisé depuis 80 ans dans les matériaux de construction a aussi son expertise dans le domaine de l’aménagement et de la rénovation, ce qui induit la restauration. La vieille pierre n’étant pas un domaine réservé à une élite confinée dans ses certitudes, les entreprises qui en ont fait leur cible, tout comme les passionnés de l’histoire entre les murs, ont besoin d’outils et de solutions réactives, comme les autres. C’est ainsi qu’il nous a été donné de « pister », via Doras, ces deux chantiers exemplaires, deux belles histoires révélatrices de l’insoupçonnable diversité et richesse du patrimoine bourguignon, portées les Guerra et les Ducherpozat.