Deux fondateurs, une directrice associée en charge de la formation, un responsable de production, un designer et un ambassadeur sportif de haut niveau : depuis Beaune, la recette de base de Brasserie de France place la bière au cœur d’une philosophie de transmission et de proximité. Casting détaillé d’un passionnant projet durable.
Jean-Claude et Anthony, le duo qui fait mousse
Ils sont entrepreneurs. Le premier a mis quelques start-ups sur les rails. Passionné par l’humain, il a même suscité des vocations entrepreneuriales auprès des jeunes dans des quartiers sensibles, avec l’association 100 000 Entrepreneurs. Le deuxième était actionnaire et dirigeait une société spécialisée dans la technologie digitale au service des points de vente, qu’il a vendue à un groupe en quête de croissance externe. Ce projet, ils l’ont construit à Beaune, dans « une vision commune de l’entreprise hybride ». Jean-Claude Balès et Anthony Verdureau sont les deux fondateurs solidaires de Brasserie de France.
Émergent alors quelques nuances. « Jean-Claude est plus à l’aise sur les terrains du marketing, je le suis peut-être plus dans l’analytique et le contrôle de gestion », résume Anthony, un ingénieur en systèmes industriels qui s’est ouvert au commerce en décrochant un master. Cet assemblage de deux personnalités complémentaires est assez lisible vu de l’extérieur : Jean-Claude Balès prêche la bonne parole, avec les mots justes et une passion communicative ; Anthony Verdureau, quant à lui, s’intéresse plus naturellement aux mécanismes de la production.
Brasserie de France est, quoiqu’il en soit, leur vision commune du campus brassicole. Soit un site de production soucieux de l’environnement, qui tourne déjà sur une base annuelle de 10 000 hectolitres (une performance pour un début d’activité !), avec l’ambition de monter à 30 000 dans les années à venir, tout en veillant à se fournir localement. C’est aussi un site de formation et de transmission porté par des valeurs nobles, Bières Expérience(s), et un pôle innovation qui devra projeter la bière artisanale dans l’ère du développement durable. Installé dans des bâtiments flambants neufs et opérationnels, ce campus brassicole accueille toutes sortes de public : restaurateurs, sommeliers en formation continue, créateurs de brasserie artisanale, amateurs de bières plus largement et, bientôt, un public en difficulté qui peut trouver dans l’apprentissage un éclairage nouveau sur son avenir.
La recherche fait partie intégrante du projet. « Nous voulons accueillir un doctorant pour avancer sur le procédé fermentaire qui permettra de donner aux bières encore plus d’identité » annoncent les cofondateurs du campus. L’identité étant aussi le territoire, Brasserie de France s’est rapprochée d’une malterie artisanale et des agriculteurs du département pour créer une bière digne de la marque Savoir-faire 100 % Côte-d’Or.
Paul, tête de production
Alchimiste, technicien et chef d’orchestre : le responsable de production est tout cela à la fois. La moindre erreur de réglage ne pardonne pas. Son orgue de 14 fermenteurs (le nom donné aux grandes cuves) demande du tact et des soins. Le blé et le houblon doivent être traités en propreté. « La moindre imprécision nous confronte vite à l’effet dominos. » Paul Venot a 28 ans. Né dans une ferme nivernaise, il voulait étudier (Université de Bourgogne, Agrosup, Institut Jules Guyot et Louvin en Belgique) pour offrir un autre destin à l’exploitation familiale. Pour l’instant, son chemin est différent. Mais vin, bière et fromage n’ont pas de secret pour ce titulaire d’un Master 2 en procédés fermentaires pour l’agroalimentaire, attaché à respecter le cahier des charges de la Brasserie de France. Son univers voyage entre une douzaine de malts et de houblons différents, quatre ou cinq levures aussi. Au milieu de ces kilomètres de tuyaux, le responsable de production est le garant d’une installation technologique qui optimise la réutilisation de l’eau pour le chauffage, favorise la gazéification naturelle pour éviter le relâchement de CO2. En bout de piste, c’est toutefois la recette qui rend son verdict. Faire de la bière, comme en cuisine, demande une certaine intuition.
Cécile, la graine du savoir
Cécile Déchelotte, zythologue de formation, est à la bière ce que le sommelier est au vin. Avec Elisabeth Pierre, rédactrice en chef de Mordu Magazine, la directrice associée de Bières Expérience(s) a conçu deux programmes de formation de brasseurs en 5 et 10 jours et trois formations continues de zythologie pour les sommeliers et les restaurateurs. L’objectif est aussi d’infuser dans le territoire une acculturation à la bière artisanale, grâce à des ateliers grand public en brassage et dégustation.
Le monde de la bière a son lot de contraintes et d’exigences. Armé de ses certifications, Bières Expérience(s) fait écho à l’évolution « d’un produit qui a désormais trouvé sa place dans la gastronomie ». Cet art de vivre passe par le choix des matières premières, la création de recettes, la technique du brassage et une bonne connaissance de la réglementation. Des modules de pico-brasseries (une toute petite unité de brassage) permettent, sur place, avec vue sur la brasserie XXL tenue par Paul, de jouer aux apprentis brasseurs. « En France, les 15 plus grosses brasseries occupent 95 % du marché », rappelle Cécile. Dans le même temps, des houblonnières et des malteries artisanales se multiplient, aspirées par ce potentiel de diversification, produisant en moyenne 200 à 400 hectolitres/an. Bières Expérience(s) a donc du grain à brasser. D’autant que la richesse viticole de la Bourgogne-Franche-Comté est source de nombreuses pistes en la matière.
Nathaël, question de style
Sans le talent d’un créatif, le meilleur produit du monde peut tomber dans l’oubli. Nathaël Santos pratique le graphisme depuis l’adolescence. Il a intégré Brasserie de France dans le cadre d’une formation en alternance partagée avec l’Esadd (École supérieure appliquée au design et au digital) à Dijon. Avec un cahier des charges exaltant : « Ma mission se résume à répondre par le design aux besoins des recettes et aux univers de marques autour de ces recettes. » Citons l’exemple de Bioz, une boisson de type kombucha : « Nom, univers, recette, je dois mettre tout cela en image. J’en crée une avec un ton amical, dans le style fait main, des feuilles, des fruits et une signature maison proche du consommateur. »
Le designer travaille une semaine sur le « brief » avant de passer son projet en « review », avec Jean-Claude Balès, dernière étape avant la validation du client. Nathaël a aussi refait le site de l’entreprise. Il planche actuellement sur la future Bière des Hospices de Beaune, qui devrait faire sensation à l’automne prochain. « Une tout autre histoire, s’amuse le jeune créatif de 24 ans. Les premiers jets sont vraiment axés sur les hospices. » On devrait donc retrouver les couleurs flamandes sur son étiquette.
Matthieu, ambassadeur de compétition
Le jour de ses 27 ans, en 2022, Matthieu Bourgeois décroche le titre mondial de duathlon. « Ce résultat a donné de nouvelles perspectives à ma carrière », confirme ce sportif de haut niveau originaire de Saint-Romain, qui croise la route de Jean-Claude Balès au détour d’une belle victoire aux 10 kilomètres du Bien Public. « On a échangé, je lui ai expliqué qui j’étais et nous nous sommes retrouvés sur bien des points. » Rigueur, effort, dépassement de soi sont des valeurs communes qui, entre sport, travail et partenariat, conduisent Matthieu à s’engager au service du campus brassicole. Un emploi du temps aménagé préserve ses objectifs d’entrainement, soit près de 25 heures par semaine.
Matthieu prône avec la même conviction et sans complexe les bienfaits du team building et des formations dispensées par Bières Expérience(s) : « Avant d’être professionnel, j’étais entraîneur sportif. Je ne suis pas un partisan de la culpabilisation, contre le plaisir d’une bonne bière après l’effort. Surtout si cette bière est sans alcool mais a beaucoup de goût, comme c’est le cas pour notre gamme BeeRun. »